Une histoire belle à se damner
Ah, je suis parfois fleur
bleue. Cela arrive notamment lorsque je me retrouve debout devant ma
vidéothèque de DVDs. Je vous épargnerai en décidant de ne pas
vous dévoiler trop rapidement les titres des films que j'ai
sélectionnés... un à la fois, c'est tellement mieux (ou c'est
moins pire)! Cette fois-ci, ce sera “Le Patient Anglais”
d'Anthony Minghella.
Cette adaptation
cinématographique de 1997 du roman 'L'homme flambé' de
Michael Ondaatje a pour rôle titre Ralph Fiennes (celui même qui
nous fait faire la grimace dans Harry Potter parce qu'il a des
entailles à la place du nez, le fameux Lord Voldemort). Ce film
atteint le summum du classique. C'est un film complexe. Les thèmes
abordés sont multiples, et on aurait beaucoup à dire si on décidait
(je ne sais si cela a déjà été fait) d'en faire une étude
poussée.
Un aristocrate hongrois
explorant le désert du Sahara, membre d'un club de géographie
britannique, se retrouve coincé entre une passion inassumée pour
l'épouse d'un collègue et la Seconde Guerre mondiale. Au moment où
cette passion commence à percer, et à être connue de tous, les
choix qu'il fera seront lourds de conséquences pour son entourage et
pour lui-même. Il choisira l'amour par dessus tout. L'amour dévorant
pour tenter d'atteindre une fois encore le bonheur fugace d'une
relation passionnelle. L'amour égoïste, à savoir le fait que
l'amour du couple (en l'occurrence adultère) prévaut sur le reste
du monde, et tant pis pour les dommages collatéraux. Par amour pour
cette femme et par un malheureux concours de circonstances, cet homme
trahira ses amis, ses collègues, et parce qu'on se mettra sur sa
route, il sera aussi contraint de tuer! Ce film montre que l'amour
justifie tous les moyens, même les plus abjects. Le personnage
principal n'a pas l'étoffe d'un héros. Et pourtant...
C'est aussi un film sur
(encore un lieu commun) la stupidité de la guerre, l'aspiration au
bonheur et l'égoïsme, les apparences qu'on se doit de conserver
pour le bien de la société, mais qui nous étouffent parfois. Les
personnages sont réalistes, imparfaits et donc attachants.
Dans la période troublée
où nous vivons, où les partis politiques extrémistes séduisent,
et où le patriotisme revient (malheureusement) à la mode, je
réalise que non, j'en suis désolée, mais je refuserai de mourir
pour mon pays. Je n'aurai certainement pas le courage de certains
résistants. J'aurai plus vraisemblablement l'instinct de survie
purement animal. L'envie de sauver ceux qui me sont chers (à savoir
les membres de ma famille que j'aime et mon amant) prévaudra sur la
sauvegarde de mon pays.
Alors oui, j'admets que
c'est certainement mon éducation qui veut cela. Je ne suis pas
volontaire pour me battre pour mon pays. Je veux bien me faire son
ambassadrice quand il s'agit de partager la culture et la langue que
j'adore, mais non, je ne verserai pas mon sang, je ne sacrifierai pas
ma vie pour ma patrie.
On découvre l'histoire
en pointillés. Elle est dévoilée par intermittence avec une
histoire secondaire (moins époustouflante à mes yeux), celle d'une
infirmière persuadée de porter la poisse à tous ceux qu'elle aime.
Elle croisera le chemin du “fantôme” du comte hongrois et
montrera, par opposition à la folie de son 'patient anglais' que
l'humanité est une qualité individuelle, facile à développer
quand on n'a personne de particulier dans son coeur.
En arrivant au générique
de fin de ce film, que je visionne régulièrement, je me dis
toujours les mêmes choses: à savoir que c'est lorsque l'Histoire
empêche la vie de tourner rond que le caractère profond des
individus se dévoile. Ca me rappelle 'au Bon Beurre' de Jean
Dutourd, mais aussi 'Né en 17 à Leidenstadt'
de Jean-Jacques Goldman.